Artwork A journey

Lorsque j’ai rencontré Patrick Messina, il y a une dizaine d’années, il était partagé entre deux tentations : le portrait et le paysage. Le portrait l’aidait à vivre (Libération, Les Inrockuptibles, etc…) le paysage était son jardin secret.
Dans les années qui ont suivi, portraits et paysages ont cessé de s’opposer pour se rallier à une vision singulière dont l’instrument privilégié est, aujourd’hui, cette folding master-technika 4×5 inches, qui est à la base de son projet. Dans l’usage qu’en fait P. Messina, cette chambre est un instrument savant et précis, certes, mais néanmoins discret, qui ne s’impose ni ne s’ajoute à la réalité qu’il approche, mais en révèle la carte magnétique en en dénudant les lignes de force.
Ainsi, au cours de voyages obstinés (P.M. n’aime rien tant que revenir sur les lieux qu’il a un jour photographiés) s’est mis en place ce qu’il faut bien appeler une machine à voir – qui serait aussi une machine à lire : à lire notre présent, notre modernité et peut être notre destin. Ce n’est certainement pas par hasard si, peu à peu, les paysages naturels se sont faits plus rares au profit de vues urbaines travaillées par un jeu saisissant de bascule et de décentrement de la chambre inimaginables il y a seulement quelques années.
Sous l’œil de cyclope de sa folding master-technika 4×5 inches, P.Messina fait apparaître un gigantesque et minutieux jeu de Monopoly. Maisons de poupées, voitures-jouets, minuscules silhouettes humaines ou animales, tout cela semble disposé dans le paysage par la main énorme de quelque Micromégas. Nous voici les témoins d’une transformation radicale de notre rapport au monde. Oui, nous avons changé de planète. Tout l’inventaire entrepris par les merveilleux primitifs du XIXème siècle est à revoir. Même les paysages sont manufacturés, comme la machine que j’utilise en ce moment pour rédiger cette note. Et pourtant….
Et pourtant (c’est le second volet du projet de P.M.) il suffit que l’œil du photographe redescende sur la terre ferme et vienne se cogner à la fourmilière humaine pour qu’une très ancienne rumeur nous revienne, par bouffées, et nous bouleverse.
C’est dans cet écart, dans ce va-et-vient entre deux visions d’un même objet (les deux poids – deux mesures de notre planète) que s’inscrit le travail de P.Messina et s’élabore une contribution précieuse au développement de l’art qu’il s’est choisi.

André S.Labarthe

Lorsque j’ai rencontré Patrick Messina, il y a une dizaine d’années, il était partagé entre deux tentations : le portrait et le paysage. Le portrait l’aidait à vivre (Libération, Les Inrockuptibles, etc…) le paysage était son jardin secret.
Dans les années qui ont suivi, portraits et paysages ont cessé de s’opposer pour se rallier à une vision singulière dont l’instrument privilégié est, aujourd’hui, cette folding master-technika 4×5 inches, qui est à la base de son projet. Dans l’usage qu’en fait P. Messina, cette chambre est un instrument savant et précis, certes, mais néanmoins discret, qui ne s’impose ni ne s’ajoute à la réalité qu’il approche, mais en révèle la carte magnétique en en dénudant les lignes de force.
Ainsi, au cours de voyages obstinés (P.M. n’aime rien tant que revenir sur les lieux qu’il a un jour photographiés) s’est mis en place ce qu’il faut bien appeler une machine à voir – qui serait aussi une machine à lire : à lire notre présent, notre modernité et peut être notre destin. Ce n’est certainement pas par hasard si, peu à peu, les paysages naturels se sont faits plus rares au profit de vues urbaines travaillées par un jeu saisissant de bascule et de décentrement de la chambre inimaginables il y a seulement quelques années.
Sous l’œil de cyclope de sa folding master-technika 4×5 inches, P.Messina fait apparaître un gigantesque et minutieux jeu de Monopoly. Maisons de poupées, voitures-jouets, minuscules silhouettes humaines ou animales, tout cela semble disposé dans le paysage par la main énorme de quelque Micromégas. Nous voici les témoins d’une transformation radicale de notre rapport au monde. Oui, nous avons changé de planète. Tout l’inventaire entrepris par les merveilleux primitifs du XIXème siècle est à revoir. Même les paysages sont manufacturés, comme la machine que j’utilise en ce moment pour rédiger cette note. Et pourtant….
Et pourtant (c’est le second volet du projet de P.M.) il suffit que l’œil du photographe redescende sur la terre ferme et vienne se cogner à la fourmilière humaine pour qu’une très ancienne rumeur nous revienne, par bouffées, et nous bouleverse.
C’est dans cet écart, dans ce va-et-vient entre deux visions d’un même objet (les deux poids – deux mesures de notre planète) que s’inscrit le travail de P.Messina et s’élabore une contribution précieuse au développement de l’art qu’il s’est choisi.

André S.Labarthe